Aucun doute, le travail à distance va imprégner durablement les pratiques des entreprises. Les salariés seront donc confrontés au quotidien de plus en plus à la prise de décision en autonomie. La culture d’entreprise sera d’une importance capitale car elle guide les comportements lorsque le P-DG n’est pas là.
Au cours de la dernière décennie, des entreprises ont développé des dizaines d’outils afin de faciliter le travail à distance. La technologie permet aujourd’hui de collaborer efficacement depuis n’importe quel lieu. Le vrai défi pour les entreprises qui adoptent le télétravail, consiste à créer et à entretenir une culture à distance.
Face à une situation nouvelle, difficile de savoir instinctivement comment se comporter pour être en accord avec la culture d’entreprise. Pour prendre la meilleure décision, l’idéal serait de s’appuyer sur une situation similaire. L’éditeur de logiciel libre Gitlab, par exemple, emploie plus de 500 personnes dans plus d’une trentaine de pays. Depuis sa création, l’organisation n’a jamais disposé de bureaux. Le télétravail est l’adn de l’entreprise. Ses fondateurs ont créé un document de 2500 pages accessible en ligne qui regroupe l’ensemble des processus mis en place. Qu’il s’agisse du marketing, de la vente ou des politiques de rémunération, il y a des exemples précis pour gérer la situation.
La transparence est d’autant plus importante lorsque les salariés ne se côtoient pas au quotidien. Il faut qu’ils puissent s’appuyer sur ce « manuel» afin de prendre des décisions sans avoir à consulter leurs collègues. A force d’utiliser le document, les employés intègrent la culture de l’entreprise et s’y réfèrent alors de moins en moins.
Pour les entreprises ayant totalement adopté le télétravail, la culture repose sur la construction de temps forts. Les membres peuvent à ces moments-là se voir physiquement, soit tous ensemble, soit par petits groupes. Chez Gitlab, ils échangent beaucoup en visioconférence afin d’éviter les silos et maintenir des liens solides entre les équipes. L’entreprise encourage même ses salariés à travailler ensemble en offrant les frais de déplacement de chez soi jusqu’au lieu de travail d’un collègue. Certains salariés en ont même profité pour rendre visite à leurs collègues dans plusieurs villes de différents pays.
C’est dans cette perspective que les fondateurs de Basecamp, éditeur d’un outil Web de gestion de projets, ont écrit « Remote : Office Not Required ». Ils recommandent de découper les missions en petites tâches. d’être le plus transparent possible avec ses salariés, de les responsabiliser en leur donnant toute l’autonomie nécessaire. Jason Fried et David Heinemeier Hansson prennent l’exemple des vacances : elles sont illimitées et il suffit d’en avertir ses collègues pour se coordonner, pas besoin de demander la « permission ».
Créer une culture à distance n’est pas plus compliqué que dans un bureau. Il s’agit de s’interroger sur ses valeurs, de définir les comportements à valoriser et de recruter des profils qui s’intègrent dans cette vision de l’entreprise. Ensuite, pour garantir la pérennité de cette culture à distance, il suffit de bien maîtriser les outils collaboratifs nécessaires, de mettre en place des temps forts réguliers et d’encourager les interactions entre les membres de l’entreprise. Enfin, il ne faut pas oublier que le travail à distance n’en est qu’à ses balbutiements et que nous sommes en pleine phase d’exploration.
Djamel Ighil